Parodius DA!
On doit à ces messieurs de Konami l’idée totalement saugrenue de donner au genre un aspect festif et délirant à priori fort incompatible avec le côté sérieux voire apocalyptique des sempiternelles missions de sauvetage qui sont le prétexte à la majorité des titres de notre art. C’est d’autant plus étonnant que Konami elle-même a institué une grande part de ce côté sérieux avec sa série Gradius, aussi matricielle que Space Invaders et autres R-Type.
Alors quand le projet d’allier shoot them up pur jus et parodie ludique s’est fait jour, autant dire que c’était pas gagné d’avance. Mais après le volet initiatique sur MSX et la version arcade, le pari fut pour le moins tenu, et bien tenu. Ainsi naissait réellement la série des Parodius, dont le premier volet sur Super Nintendo est encore aujourd’hui un digne représentant, et comme pour le bon fanboy Super Nintendo que je suis, LE volet à connaitre entre tous.
L’histoire est dramatique, pensez-vous : nos politicards ne pensent qu’à s’en mettre plein les fouilles, les familles se désagrègent car les pères ne pensent plus qu’à leur carrière, les fils perdent leur temps devant leurs écrans, bref l’humanité est en danger. On dit que ce bien triste état de choses est l’oeuvre de la mystérieuse Grande Pieuvre, entité suprême d’un folklore bien nippon et surtout bien décadent…Otopus, gentil petit céphalopode qui n’a pas encore fini en sashimi, décide de prendre des vacances dans son F2 pour poulpe en préfabriqué, et lisant son journal, voit le premier cliché de la Grande Pieuvre, et là, le choc : cette Grande Pieuvre…n’est autre que son père ! Et aussitôt, ses trois bons amis, Vic Viper (qui s’est empâté suite à une trop grande consommation de pâtisseries), Twin Bee et Pentarou arrivent en courant, eux aussi ont lu le journal ! Afin de sauver l’humanité de la turpitude et de découvrir la vérité, nos quatre mousquetaires se mettent en route.
Je le dis haut et fort, cette version Super Nintendo est un absolu chef d’oeuvre. Les graphismes sont riches et colorés, et malgré quelques éléments censurés (ah, Nintendo…) comme la présence du tableau La Naissance de Vénus de Botticelli en toile de fond, le tout est très fidèle à l’arcade et parfaitement lisible même lors de passages serrés ou chargés, une vraie démonstration de savoir faire sur la 16 bits de Nintendo. Les quatre engins ont chacun un armement personnalisé qui reprend le schéma désormais connu de tous emprunté à la série Gradius, et ce fait augmente grandement la durée de vie du titre, car finir le jeu avec un personnage ne veut pas dire qu’on peut le finir avec tous les autres…
L’ambiance est indubitablement le principal atout de cette version. Les musiques et autres effets sonores sont absolument déments. Merveilles de concepts, les thèmes classiques et autres cantiques passés à la sauce pouêt pouêt ont su assurer une identité propre à toute la série, et dans ce premier volet sur SNES, le son est au top. Les plus érudits d’entre nous auront reconnu les morceaux d’origine, et se battre contre des petits cochons enfermés dans des bulles au son d’une valse viennoise vaut tous l’or du monde… Amateurs de Nonsense, ce jeu vous est dédié !
La version Super NES a également le privilège de comporter des ajouts exclusifs comme le niveau des bains publics, qui curieusement est assez simple en dépit de sa position élevée dans le jeu. Mais ce qui fait de Parodius un authentique délice et ce depuis l’origine, c’est précisément l’aspect pastiche et satirique qui fait voir le jeu d’un autre œil. Certes, le programme reprend énormément des éléments de Gradius et Salamander, mais pas que, et là, à vous de reconnaître les fines (enfin fines…) allusions au monde du jeu vidéo dans son entier. Et notamment à R-Type, le rival de Gradius, avec un vaisseau revu à la sauce Parodius ou encore l’intrusion du boss 5 de R-Type quelque part dans le jeu, devinez où et quand ! C’est avec ce Parodius que Konami a vraiment bousculé les codes usuels du shmup et aussi montré que ses personnages étaient devenus non seulement des sources d’inspiration, mais encore plus, d’un authentique folklore.
Le tableau est donc idyllique, mais comme la perfection n’est hélas pas de ce bas monde, je vais mais sans grande conviction tenter de trouver des points faibles à ce jeu qui d’ores et déjà est un classique et se doit de figurer au nombre des incontournables de la bécane, et dans les affaires perso de tout amateur de SNES qui se respecte. L’animation souffre encore de ralentissements mais de façon si sporadique qu’il faut vraiment être au dernier niveau et en mode de difficulté max pour s’en apercevoir. Outre la censure précédemment indiquée (mais pourquoi la célèbre danseuse de fin du niveau 2, icône du jeu, ne nous fait plus son petit mouvement lascif de danse du ventre ? Remarquez, quand on pense à ce qu’elle avait osé devenir dans la version NES du jeu, on ne peut pas se plaindre), et pourquoi les lèvres cracheuses de dentiers de la fin du stage 3 ne se passent plus ce petit coup de langue si excitant ?…Et bien outre ceci qui nuit un peu à l’identité du jeu originel mais qui n’entache en rien le plaisir de cette version SNES, le seul « défaut » du jeu est le syndrome du » je reprends à poil au checkpoint après une mort », et au vu de la difficulté des derniers stages,c’est un handicap assez pesant. Mais pour l’éviter, rien ne vous interdit de survivre ! Le jeu est quand même conciliant car reprendre à poil fait baisser le rank. On peut aussi mentionner la difficulté de certains tableaux qui parfois rend la courbe de progression irrégulière, comme le niveau patchinko qui est une vrai cauchemar au vu de sa position dans l’ordre des stages, mais bon.
Mais bon quoi ? Mais bon ce jeu est un bijou authentique et une tuerie indispensable. Un classique, concentré de fun et de culture ludique Konami-esque qui aura une longue descendance et, chose à souligner, dès que Parodius frappe sur un support, c’est toujours réussi (avec peut-être une nuance quant à la version NES en ce qui me concerne, mais bon c’est une opinion personnelle). Le jeu offre aussi un Omake stage (appelé Lollipop stage en version PAL), excellent exercice de score sur un niveau bien délirant. Ce qui me fait encore plus plaisir, c’est qu’à l’époque où je luttais face aux pingouins déchaînés et autres Vénus au cri suggestif (tiens, ça ça n’a pas été censuré), j’étais à cent lieues de me douter que Parodius allait devenir une série à part entière… A vrai dire, j’ai même connu ce Parodius avant Gradius, amusant de connaitre la parodie avant l’oeuvre originelle ! Et c’est d’autant plus émouvant qu’aujourd’hui, 18 ans après, je me rends compte que j’ai vécu la naissance d’un mythe.
Testé par Yace
Test crée le 7/06/11 à 18:28, modifié le 9/10/17 à 20:08